
Dans cette région, la jouissance des terres par les communautés locales posent encore problème. Si les uns manquent de terres à exploiter jusqu’aujourd’hui, d’autres qui en ont craignent par contre des spéculateurs fonciers toujours aussi efficaces.
Ainsi dans le paysage Virunga, les conditions de vie des communautés locales sont fragilisées.
Et pour survivre, certains paysans riverains dépourvus, se rabattent du coup aux ressources naturelles du parc national des Virunga.
Au départ, les terres des communautés locales étaient régies par les coutumes locales et gérées en même temps par les autorités coutumières. Selon la législation coloniale, ces terres étaient la propriété des peuples indigènes. « Chacun avait au moins un petit lopin de terre attribué par le chef coutumier et tout allait bien » indique, nostalgique, Célestin Kyaghulwa l’un des notables de Rutshuru. Peu après, l’Etat postcolonial est venu supprimer la reconnaissance des droits fonciers coutumiers.
Comme cet extrait de la loi foncière de la République démocratique du Congo, « le sol et la propriété exclusive, inaliénable et imprescriptible de l’Etat…» les lois foncières successives ont fait de la terre une propriété exclusive de l’Etat congolais. Ne tenant pas compte du pouvoir coutumier, la vieille loi du 20 juillet 1973 fait des peuples autochtones, les occupants illégaux sur leurs terres ancestrales. En effet, dans un contexte d’extrême pauvreté et d’explosion démographique dans le paysage Virunga, la terre fait l’objet de spéculation et de vente illicite.
« Des particuliers ayant de l’argent sont ainsi devenues des grands propriétaires terriens (concessionnaires) au détriment des citoyens ordinaires sans moyens…» affirme Kasereka Mwimbi, président du comité local de développement et de conservation (CLDC-Bwisha). A lui d’ajouter que les pauvres paysans ont du coup considéré le parc des Virunga comme leur dernier rempart de survie : « dépourvus des terres à exploiter, ces riverains n’ont eu aucune autre choix que d’aller s’installer à l’intérieur du parc des Virunga pour cultiver, chasser les animaux et couper du bois… »
Depuis, la situation foncière dans cette partie demeure problématique au regard de l’insécurité foncière qui y prédomine. Et pour le CEPED (centre d’éducation pour la protection de l’environnement et le développement durable), cela ne garantit pas une conservation durable d’écosystèmes et de la biodiversité que regorge le paysage Virunga. « Il y a plusieurs défis liés notamment à la gouvernance foncière et à la connaissance même des actes ou des procédures pour accéder aux titres fonciers…est cela prive aux plus pauvres le droit d’accès ou de jouissance des terres coutumières » renseigne Maitre Olivier Ndoole membre du Conseil d’Administration de l’organisation CEPED, évoquant notamment un vide juridique dans le domaine foncier dans ce sens.
Nécessité d’une reforme foncière
Pour mieux protéger les droits fonciers des communautés locales et peuples autochtones dans le paysage Virunga. Il y a peu, le CEPED avec l’aide de ses partenaires, mène une série d’actions dans les territoires avoisinant le parc des Virunga notamment à Beni, Lubero et Rutshuru. Il s’agit selon Eddy Kambale, coordonnateur de cette organisation de la société civile « d’évaluer la tenure foncière des communautés locales dans le paysage Virunga et d’élaborer de commun accord, une stratégie multi-acteurs de lutte contre l’insécurité foncière des communautés locales » a-t-il fait savoir lors des travaux en atelier du 27 au 28 décembre dernier à Kiwanja.
« C’est paradoxale quand d’une part on dit que le sol et le sous-sol appartiennent à l’Etat, et que d’autre part le même Etat reconnait qu’il y a des terres dont la jouissance est reconnue de part la coutume » indique Me Olivier Ndoole. Bien plus, il admet qu’il faudra une réforme foncière qui met en place par exemple un mécanisme juridique qui sécurise les droits fonciers coutumiers non titrés : « parce qu’en bref, si les communautés locales ont un accès facile à la terre et une sécurité par rapport au foncier, automatiquement elles ne se rabattront plus sur le parc des Virunga »
C’est ainsi que le CEPED s’est lancé le défi de contribuer à la promotion et la défense des droits de tenure et des propriétés foncières des communautés locales et peuples autochtones dans le paysage Virunga.
Pour la coordination de CEPED,asbl