Atelier d’échange sur l’accès des femmes à la terre au Nord Kivi : problématique et pistes des solutions autour du PNVi

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La problématique de l’accès à la terre au Kivu en République Démocratique du Congo (RD Congo) est ancienne et complexe. Bien que cette question se pose également dans d’autres endroits du pays, la concentration des ressources dans les sous-sols de cette région accroît la pression foncière. La crise foncière a plusieurs causes et revêt différentes dimensions. Elle se décline d’une part en une transition foncière inorganisée, et d’autre part par l’opposition des intérêts de l’État et des populations locales au sujet de la conservation de la nature. Les stratégies d’accumulation et d’accaparement par les élites contribuent également à l’aggravation de la crise foncière autour du Parc National des Virunga.

Sur le continent africain le droit foncier se caractérise par des inégalités dans l’acquisition et la propriété des terres. La RD Congo ne fait pas exception. Les défis de cet accès sont liés à des causes socio-anthropologiques, sociales et politiques. L’intégration de la dimension genre dans les règles d’accès et de sécurisation des droits fonciers en milieu rural est trop faible et se traduit par une plus grande vulnérabilité des femmes.

Toutes choses restant égales par ailleurs, le genre est décrit comme étant un déterminant capital dans les droits d’accès et les responsabilités de gestion des ressources foncières.

En effet, l’homme et la femme n’ont pas des droits égaux sur la gestion des ressources naturelles et bénéficient différemment des revenus qui en découlent. Il est dès lors nécessaire de s’intéresser à leur accès, et notamment à la terre, qui, en milieu rural est le principal moyen de subsistance dont dépendent les ménages, à travers notamment l’agriculture et l’élevage.

Sur les 40% des terres agricoles disponibles à travers le monde, les femmes possèdent moins de 2% d’entre elles. Pourtant elles effectuent 2/3 du nombre d’heures de travail relatif à la terre et produisent plus de 50% des aliments qui en sont issus. De plus, elles ne gagnent que 10% des revenus issus de ces productions. Malgré ceci, les femmes réinvestissent la quasi-totalité (90%) de leurs revenus dans leur famille, alors que les hommes ne réinvestissent que 30 à 40%.[1]

L’accès équitable aux ressources économiques est pourtant crucial, tant pour la croissance économique et le développement du pays que pour l’achèvement de l’égalité de genre et l’émancipation des femmes. L’analyse des droits d’accès à ces ressources se focalise le plus souvent sur les droits détenus par les ménages, et de facto ou de jure les ménages à chef masculin, sans s’intéresser à la manière dont ces différences existent entre les individus sur base du genre, de l’âge, du revenu, du niveau d’étude ou d’autres caractéristiques spécifiques.

Dans la plupart des zones riveraines des Aire Protégés, comme le groupement de Bukoma et Kanyabayonga, l’économie est essentiellement basée sur l’agriculture et l’élevage. La terre est donc un élément capital pour la promotion des activités économiques, surtout en milieu rural. Son accès équitable est une condition sine qua non au développement des populations et des états.

L’accès des femmes au foncier a été de tout temps un problème crucial et le demeure. La gestion des ressources foncières a toujours été l’un des éléments essentiels des activités de la communauté. Selon les époques et les options politiques, elle est tributaire des traditions politiques et culturelles.

Cependant, depuis quelques années, les institutions internationales, les ONG, les groupes de pression et les associations de femmes réclament une meilleure prise en charge par les autorités des véritables problèmes qui entravent l’accès équitable des femmes à la terre et aux autres ressources naturelles et qui constituent un obstacle à une meilleure productivité économique et au progrès social.

Presque tous les gouvernements ont adopté des politiques visant à donner les mêmes chances aux hommes et aux femmes d’accéder aux ressources naturelles et, en particulier, à la terre. Mais sur le terrain la réalité est toute autre. Les femmes continuent de subir toutes sortes de discriminations qui les éloignent de cette ressource précieuse qu’est la terre, indispensable à leur autopromotion et au développement socioéconomique de leurs pays.

Cette situation appelle à des actions de concertation au niveau national et local afin d’échanger les expériences, analyser les obstacles et de faire des propositions concrètes pour des interventions plus efficaces qui pourraient contribuer à améliorer l’accès des femmes au foncier et à son contrôle.

C’est dans cette logique que se tenu en date du 24 mars 2020 dans la commune rurale de Kiwanja un  atelier dont l’objectif est  d’identifier les priorités en termes de recherche et de plaidoyer afin de favoriser l’accès des femmes à la terre au Nord Kivu en République Démocratique du Congo.  Plus spécifiquement, il s’agissait de :

(i) Faire un état des lieux de la problématique et des initiatives existantes autour du PNVi, en mettant en évidence l’importance des liens entre l’accès à la terre et le statut des femmes, la pauvreté, la vulnérabilité de déplacer interne, etc.

(ii) Partager les expériences et les initiatives existantes dans les localités riveraines visant à promouvoir de façon participative la formulation de politiques et la réalisation d’actions facilitant l’accès des femmes à la terre et en extraire des leçons stratégiques (résultats, blocages, etc.).

(iii) Identifier des pistes de solutions et de mises en synergies dans le but de renforcer les initiatives déjà en cours.

Pour atteindre ces objectifs, les facilitateurs ont  utilisés  une méthodologie participative. Des apports sous forme de communications, de témoignages, d’expériences, et de documents visuels et écrits ont été sources de nombreux échanges, partages et réflexions.

Les participants représentaient une diversité d’origine – la société civile et les organisations paysannes, les services de l’Etat et les leaders communautaire, les instituts de recherche et universités ainsi que les bailleurs de fonds.

Ceci a permis de confronter les différents points de vue tout en mettant en évidence les complémentarités et les possibilités de synergies.

L’atelier s’est structuré autour de trois grands thèmes :

1. Etat des lieux

2. Formulation de pistes de solutions

3. Synergies & mises en réseau

C’ainsi que :

  • Un état des lieux de la problématique et des initiatives existantes autour du PNVi, en mettant en évidence l’importance des liens entre l’accès à la terre et le statut des femmes, la pauvreté, la vulnérabilité de déplacer interne a été partagé ;
  • les expériences et les initiatives existantes d’accès au foncier par les femmes dans les localités riveraines ont partagées
  • Des pistes de solutions et de mises en synergies ont identifiées pour renforcer les initiatives existantes.

Un plan de plaidoyer d’accès de la femme à la terre sera mise en œuvre.


[1] Accès à la terre en milieu rural : différences de genres et genres de différences, septembre 2018 Justice et paix

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